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TExtes et poèmes du 19e cycle
 

Julie :        Anne -Marie B               
Ne t’en fais pas Julie 
Ne chiale pas pour un mec
T’as assez perdu de temps
T’as bien fait de te tirer.

 

Tu sais la vie est courte
Il n’ faut pas la paumer
Pour un Jules qui gueulait
Et te reluquait à peine.

 

Il disait qu’il te kiffait
Que c’était pour perpète
Mais regardait bien souvent 
Les canons qui passaient.

 

 Allez, chiale pas Julie
Pour un mec pas réglo
Qui t’piquait ton pognon
Pour aller se bourrer grave

 

Et l’soir quad il s’ramenait
Avec une gueule de bois
Toi tu avais les jetons
Il arrivait qu’il te tabasse

 

Allez  chiale pas Julie
T’as assez perdu de temps 
Avec un enfoiré
Qui te faisait  trop flipper

 

 Allez chiale plus Julie
T’as bien fait de t’tirer.
Allez chiale plus Julie 
T’as bien fait de t’tirer. 

 

Pleine lune :       Freddy T
Micronouvelle  

C'est nuit de pleine lune sur le village. Les animaux, au point d'eau proche des bords de la savane, poussent des cris aigus et inquiétants. D'autres, souvent leurs prédateurs, émettent des grognements rauques et des rugissements. Clémentine a un mauvais pressentiment. Elle sait pourtant qu'il y a souvent beaucoup de travail au dispensaire et que ses parents font souvent des heures supplémentaires. Le trajet sur la piste est dangereux la nuit. Un animal, ébloui par les phares de la jeep, peut avoir des réactions de panique. Mais ses parents le savent,  les blessures soignées au dispensaire sont le plus souvent infligées par des hommes. 
La nuit  avance  Les fauves  se sont désaltérés. Le couple n'est pas rentré. Les bruits de la savane se font plus rares. Clémentine est de plus en plus inquiète. Un cri bien connu arrive à ses oreilles. Nelson, son chimpanzé, lui saute dans les bras. Nelson ne rentre jamais seul. Bientôt, un véhicule tout-terrains quitte la piste et entre dans le village. A bord, les gardiens du parc font une mauvaise tête. Ils ont évidemment reconnu les infirmiers du docteur Musangui. Ils ramènent leurs corps. Les braconniers ne laissent pas de témoin.

 

Le dégoût :    Martine C. 
L’assiette chaude est déposée devant moi.
Un amas de pommes de terre, un steak sanguinolent, des haricots à l’odeur fade.
Je vais devoir avaler tout cela ?... et ce liquide écarlate qui glisse sous les légumes.
Maman m’observe sévèrement. Le jus rosé atteint maintenant les pommes de terre. 
Je connais la sentence. Si je ne mange pas tout et que je fais ma difficile l’assiette me sera resservie froide au repas du soir.
La fourchette peine à s’ enfoncer dans le morceau de bœuf et le couteau dérape sur la chair presque crue.
J’ai le cœur au bord des lèvres.
Je n’y arriverai pas.

 

Mamy :      Laurence F
Sur le mur d’la cuisine
Y’a un calendrier
Les jours s’y débinent
C’est tell’ment raturé

 

Dans tous les petits coins
On trouve des papiers
Faut pas en faire un foin
C’est just’ pour se rapp’ler

 

Le dentier déposé
Au fond du cendrier
Chaqu’ fois le mêm’ refrain  
Elle recherche ses biens

 

Les jours d’félicité
Ell’ ref’ra du gâteau
Éclair d’lucidité
Ça sent pas le brûlé

 

C’est l’fouillis
Dans la têt’ à Mamy
C’est un peu gribouillis
P’tit à p’tit
Son esprit qui s’enfuit
Petits pas de souris

 

La journée à l’envers
le p’tit déj’ au souper
Ell’ remonte le temps
C’est assez amusant

 

Et quand pleine d’entrain
Ell’ me tend son bull’tin
L’espace d’un instant
Je deviens sa maman

 

Si ell’ me remet pas
Elle croit qu’ça s’voit pas
Ell’ retomb’ sur ses pattes
D’un habile saut de chat

 

Quand ell’ trouv’ plus ses mots
Qu’y a défaut d’connexion
Ell’ se marre illico
Fin d’la conversation

 

C’est l’fouillis
Dans la têt’ à Mamy
C’est un peu bigoudi
P’tit à p’tit
Son esprit qui s’enfuit
Petits pas de souris

 

Au fond d’un pupitre
Y’a un livre écorné
Ell’ relit l’mêm’ chapitre
Sans jamais l’remarquer

 

L’inconnue dans l’miroir
Chaque jour la surprend
Ell’ fera pas d’histoires
Ell’ trouv’ ça distrayant

 

Parfois d’vant la télé
Ell’ retrouv’ ses vingt ans
La voilà vir’voltant
Dans un rock endiablé

 

Dans son lit ell’ sourit
Quand vient enfin la nuit
Béni soit l’paradis
L’oubli qui l’engloutit

 

C’est l’déni
Dans la têt’ à Mamy
Ell’ se fich’ de c’qu’on dit
Et tant pis
C’est en rose ou en gris
Que la vie lui sourit

 

Les fiancés                       Bernadette B.
mots « imposés » par le hasard : noix, colle, quitter
 Les choses se passent comme si tout allait bien.   Et pourtant … elle broie des coquilles de noix pour évacuer sa colère. C’est dingue comme il peut l’agacer avec ses remarques aigres-douces. À ses yeux, elle est toujours trop ceci ou pas assez cela. À se demander pourquoi il l’a demandée en mariage. Elle n’est pas pressée et souhaiterait mieux le connaître sauf qu’à son  époque, il n’est pas question de vivre « à la colle », c’est le mariage ou chacun reste chez ses parents.
Elle hésite de plus en plus à poursuivre leur relation mais son entourage ne comprendrait pas qu’elle rompe. Il présente bien, est charmant en public et ne change d’attitude que quand ils sont seuls. Elle se sent piégée mais après une dernière remarque acide, elle décide enfin de le quitter sur - le -champ : la coupe est pleine…  et pas seulement celle des coquilles de noix !
    

 


Le Marché de Noël :     Laurence F.

La neige tombait abondamment. Le commerçant assistait impuissant à l’ensevelissement de son chalet. Étrangement, il semblait être le seul dans tout le village de Noël à subir cet assaut hivernal. Ses appels à l’aide étaient étouffés par des flocons toujours plus épais. Pas un regard ne se posait sur lui. Tous ses beaux foies gras disparaissaient l’un après l’autre, littéralement engloutis sous de lourdes congères.
Le dos voûté, il ne lui restait plus qu’à quitter le marché. Se retournant pour contempler une dernière fois ce désastre, il aperçut l’écriteau: «l’entièreté des bénéfices sera reversé à Gaïa.»


Mon village :  Maïté P.
Dans mon village
Quand le soleil se lève
Une brise bleue
Embaume mon cœur léger
Et reviennent les souvenirs

 

Et si…      Françoise G.    


Un koala en képi sur le quai d’une gare.
Un kangourou en costard à la porte d’une galerie d’art.
Un casoar en bermuda sur le tabouret d’un bon  bar.
Un gecko en lunettes noires aux commandes d’un lupanar.
Un émeu en casquette rangeant ses placards …

— Qu’est-ce qui te passe par la tête, demande l’éditeur au dessinateur ? Tu as forcé sur le pinard ?
— Leurs forêts sont cramées, leurs savanes bétonnées, leurs lacs pollués… Faut bien qu’ils vivent quelque part…
— Je ne suis pas Greta Thunberg, je ne suis pas Paul Watson, s’énerve l’éditeur. Mois je fais dans le rentable. Tu vas me remettre tes bestioles à leur place, et les idées des moutards aussi !
—Ça va pas être possible, dit le dessinateur, regarde. Il y a un chien dingo qui fume ton cigare,  
un autre qui fouille parmi tes falzars, 
un troisième qui  pionce dans ton plumard,
 et un dernier qui empoche tes dollars. 
Tu vois, pour toi c’est trop tard. 
Quant à moi, il me reste pour le moment mes crayons, mes rêves et mon clébard.

 


La panne :    Dany D.
Micronouvelle
Trois euros vingt cinq. Le petit gâteau du dimanche. Envie.
Le manteau, l'écharpe, le porte-monnaie. Le  vrombissement des voitures.
Le feu reste rouge. Longtemps. Les autres passages que je dois emprunter sont dotés à intervalles réguliers de petits bonshommes verts. Moi, j'attends au rouge. Heureusement, le gâteau, lui, m'attend aussi. Réjouissance. Toujours rouge ! D'autres piétons ont quand même traversé. Moi, pourquoi est-ce que j'attends ?

Froid. Seul, mon estomac est chaud, il se délecte déjà.
Longtemps ! Attendre !
Le soir tombe. Le feu rouge devient plus lumineux. Comme un signal. Allez! Je fonce !
Accident grave sur la place. Un tué.
Le boulanger vend le gâteau à une autre personne qui en avait eu envie, qui s'était réjouie, qui s'en était délectée à  l'avance.

Sonnet à la Rimbaud :    Martine C.
La marée gloutonne lèche les bancs de sable fin.
Des vagues mousseuses s’épanchent lascivement.
La mer déchainée étale son miroir sans tain.
Le ciel tourmenté écrase les goélands.

L’horizon s’en est allé perdu dans les gris 
D’une palette épaisse où s’unissent l’eau et l’air.
L’odeur du sel et des lichens fouette les débris
D’une épave, sculpture de temps révolus et fiers.

Pieds nus, elle marche sur le sable aux coquillages brisés
Tout l’appelle à s’abandonner aux flots endiablés.
Soudain, un chien fougueux surgit, des plumes grises
dans la gueule, la vie et la mort amenuisées.

 

L’araignée :   Maïté P.
    Ecoute bien, mon petit Jean-Jean, je vais te raconter une histoire avec plein d’animaux.
Il était une fois une araignée, tu sais bien, araignée du matin chagrin, araignée du soir espoir.
Elle voulait remporter le concours de la plus belle toile d’araignée mais c’était un travail de fourmi et notre araignée était un peu paresseuse… Elle regardait les mouches voler en se balançant au bout de son fil ou papillonnait à gauche et à droite, sans se mettre à l’ouvrage.
Notre araignée commençait à se tracasser, jamais elle ne terminerait dans les temps, elle s’était fourrée dans un drôle de guêpier.
Alors elle s’est secoué les puces, a ferré les sauterelles et de ses longues pattes agiles, elle s’est activée, sinon, on allait lui chercher des poux.
Elle y a passé la journée et le soir venu, sa toile était terminée !  Elle a contemplé son œuvre, elle était magnifique !  Satisfaite, elle a replié ses longues pattes et s’est endormie.
    Allez, Jean-Jean,  pour toi aussi il est temps de dormir.
    Bonne nuit, Jean-Jean.
Jean-Jean était habitué aux histoires d’animaux de son papa, qui était entomologiste !


Tapez 1 :  Dany D.

Bonjour !
Vous êtes bien à la Société Paradis Express.
Si vous êtes sûr d'être mort, tapez Etoile. Si vous êtes vivant, raccrochez.
Ah, vous n'avez pas raccroché !
Bienvenue chez nous !
Si vous êtes mort de façon violente,  tapez D, comme Dur-Dur. Si vous êtes mort d'une longue maladie, tapez S, comme Soulagé. Si vous ne savez pas de quoi vous êtes mort, tapez P, comme Point d'interrogation. Si vous vous êtes suicidé,  tapez O, comme Ouf, enfin !
Vous avez choisi le menu D, Dur-Dur, pour les morts violentes. N'ayez pas peur ! Votre malaise va se terminer bientôt.  Si votre mort est liée à la maladresse d'une autre personne, tapez M, comme Merde, alors ! Si votre mort est liée à votre distraction, tapez DD, comme Di Dju D'nom Di Dju ! Si votre mort est liée aux conditions atmosphériques liées au changement climatique, tapez CC, comme les Casse-Couilles d'écolos nous l'avaient bien dit. Ah, vous avez choisi CC ! Je vous plains, mais en effet, on vous l'avait bien dit.Dites, par curiosité, c'était quoi ? Une trombe d'eau, un glacier qui s'est détaché ou un vent de 300 km à l'heure ?
La communication se coupe ici. Il faudra tout recommencer.

Rupture :   Monique M.
La chose est là, menaçante, tapie dans un coin de la pièce, ou  peut-être simplement  dans sa tête. Elle doit partir, c'est une question de survie. Elle doit avancer seule, en laissant tout derrière elle : le pire, les humiliations, les coups, la dépendance, mais aussi le meilleur : l’amour et la tendresse des premiers temps, un toit, le confort matériel, et surtout ce désir d'enfant inassouvi. 
Elle jette un dernier regard effrayé par-dessus son épaule. La crainte de l'inconnu transparaît dans son regard, mais elle se veut forte. Elle s'est vêtue de rouge et en a souligné ses lèvres, c’est un symbole de force et de détermination, une déclaration audacieuse malgré la peur. La chaleur du rouge  qui tranche avec la froideur de l’arrière-plan incarne son conflit intérieur. Elle lutte, se débat entre son désir de fuir et l'incertitude des lendemains. Le tableau capture ce moment de fragilité et de courage.

Deux amoureux sur le Marché de Noël :     Olivier H.
Au milieu de la nuit, quand le Marché de Noël s’est endormi, quand tous les volets sont abaissés, un grand froid se glisse entre les chalets. La dernière ronde de police vient de passer.
Alors, sans faire de bruit, un couple d’amoureux descend des coteaux, en empruntant prudemment les grands escaliers verglacés. C’est un petit bonhomme de neige tout rond et sa petite bonne femme de neige toute potelée. Ils se tiennent par leurs menottes en bois de châtaigner et se font des baisers sur leurs joues de neige en entrechoquant leur petite carotte pointue.
Le marché, pour eux seuls, se ranime. Un tout petit peu, pour ne pas réveiller le quartier. Pas de crêpes ni de marrons chauds, ce n’est pas bon pour leur santé! Une petite musique carillonne, tout doucement, pour ne pas réveiller le quartier.
Pour eux seuls, la Grande Roue se remet à tourner en grinçant sur son axe. Très délicatement.

 

Noémie :   Olivier H

À la manière de «la mère à Titi».


Noémie, c’t’une déesse
Aux yeux magnétiseurs
Une bell’ pair’ de … tresses
Mieux que cell’ de sa sœur

 

Si j’ parl’ de Noémie
C’est qu’ell’ me rend dingo
J’ vous dirais «c’est ma mie»
Si j’étais l’père Hugo

 

Elle a un p’tit bateau
Un youyou à cent balles
A pein’ un gros canot
Amarré dans l’canal

 

Ell’ dit «ce monde pue,
C’est pas moi qui suis barge
Quand tout sera foutu
J’me barr’rai sur mon arche»

 

Noémie
Avec son vieux rafiot
s’envol’ra sur les flots
Noémie

Avec son traversin
Et son lapin crétin

 

Son canot est tout p’tit
Alors pour les bestiaux
Ell’ a dit «bah tant pis,
J’les prendrai en photo»

 

«J’mettrai mes magazines
En pil’ à fond de cale
Mes trent’ millions d’amis
Et mon hebdo Cheval»

 

«Je m’abonn’rai à tout
Bien que j’sois dans la dèche
Les meuh-meuh, les toutous
Et même Chasse et Pêche»

 

Ell’ amass’ tant d’papier
Moi j’dis rien, mais je dirais
C’est tout vu, c’est plié
L’bazar va chavirer

 

Noémie
Avec son vieux rafiot
s’envol’ra sur les flots
Noémie
Avec son sac à main
Et son lapin crétin

 

Quand je crois’ Noémie
En bas de l’escalier
J’essaie d’êtr’ le gentil
poète animalier

Je lui attrap’ la main
Je parl’ des p’tits zoziaux
J’lui racont’ des machins
pleins de p’tits animaux

 

Et quand ell’ me sourit
Je suis aux petits soins
Surcouf ou Tabarly
Je serai son marsouin

 

Pas sûr que le bateau
Quittera son canal
Si j’y pos’ mon chapeau
Ce s’ra déjà pas mal

 

Noémie
Voguera vers Honfleur
Avec vot’ serviteur
Noémie
Et son lapin crétin
Et mon chien Rintintin

 

Une colère de fourmi     Monique M   
Quand il pénétra dans la pièce, les rires se turent brusquement, comme un concert de cigales interrompu par l’orage. Ses collègues le saluèrent avec une déférence forcée et un sourire en coin.
Il ne savait pas ce qui le retenait encore de donner un coup de pied dans la fourmilière — il en avait pourtant bien  des fourmis dans les jambes !

Il n’avait jamais fait de mal à une mouche, mais là, c’en était trop ! Depuis des mois, on lui cherchait des poux dans la tête. Tout cela par pure jalousie, depuis que sa récente découverte, fruit d’un travail de fourmi, avait été publiée.
Le ver était dans le fruit depuis longtemps. Il avait bien eu la puce à l’oreille : cette animosité déguisée transparaissait dans les compliments sibyllins que ses collaborateurs lui adressaient.
Il était temps de réagir, de mettre fin à ce harcèlement quotidien. Il piqua une colère telle qu’on entendit les mouches voler.
Et dans un dernier éclat, il claqua la porte du laboratoire, laissant derrière lui un silence... de cimetière à papillons.


  Promenade :    Françoise G.

 Une rade grise où stagnent des bateaux :
Vases gluantes, algues mourantes, galets, 
Vieilles carcasses rouillées, lambeaux de filets. 
Dans le ciel si bleu un goéland comme badaud.

Un passant mince, sac au côté, blanc chapeau
Et le menton recouvert d’un poil dru et sec
Brave le soleil  et les pièges du varech
Insouciant des embruns qui saumurent sa peau

Il va vers les lourds squelettes métalliques
Les coques percées, les proues apathiques
Les encres à jamais figées, les bouts de bois

 Une tôle, une flaque d’huile l’arrêtent,
Il caresse une peinture qui s’émiette
Il traque la beauté, l’œil en émoi


Le réveil de la Belle :   Gene H. 
Détournement de conte.
- Aurélie, ma chère, vous êtes enfin réveillée !  Et nous voilà au 12e siècle ! 
- Mon bon Prince, malgré la constance de votre amour, ce siècle n’est point à mon goût. Ici dans ce château, on me prend pour une simple  tapisserie.
-Voyons, tout de même, notre tapisserie ne vaut-elle pas  celle de Bayeux ?
- Peut-être,  mais je veux dire que je ne joue aucun rôle ici. J’attends que vous ayez fini de guerroyer ou que la partie de chasse touche à sa fin pour enfin vous revoir. 
- Que voulez-vous dire ? Une femme attend son mari. Ainsi va le monde !
- Seulement, moi, figurez-vous, Philippe, j’ai dormi  si longtemps…  et j’ai rêvé d'un monde plus égalitaire. Un monde que j’aimerais découvrir.
  -Bah !  Vous déchanteriez, n’en doutez point. Si ne m’en croyez, allez donc consulter le sage du village.
- Je l’ai fait. Selon lui, grâce à mes capacités de voyager dans mes rêves,  je devrais viser le 20e siècle où la condition des femmes aurait connu quelques progrès.

Le prince ne s'opposa pas à ce qu’il appelait les lubies de son épouse.  Peu de temps après il rendit on dernier souffle.  Aurore le pleura longtemps avant de se  décider à reprendre sa vie en main et d'enfin entreprendre une longue traversée du temps. Ce qu’elle fit.

Elle se réveilla en sursaut, aveuglée par les lumières  crues d’une pièce inconnue.  Elle porta ses mains  à ses oreilles pour atténuer le tumulte  de voix aigües qui fusaient de partout. 
Pas de doute : elle se trouvait au cœur d’une réunion de militantes féministes.
Bientôt un attroupement se forma autour de la mystérieuse inconnue. Sa lenteur et sa nonchalance juraient avec l’effervescence ambiante. Sa robe en brocart couleur de lune et aux dentelles de givre détonnait avec les vêtements modestes, sans corsage,  ample et aux couleurs vives des suffragettes . Cependant , toutes   furent subjuguées par la beauté de la jeune dame. 
-Elle est belle comme une princesse !
-Je suis la Princesse Aurore, la véritable Belle au Bois Dormant.
Elles éclatèrent de rire :  
- Franchement, la Belle au Bois Dormant ? C’est de la mythologie pour enfants, ça ! Rien de réel.  
- Idiotie ! Une héroïne de conte de fées, tout au plus. Ma grand-mère me lisait ces niaiseries quand j’étais petite. Mignon, mais dépassé, complètement !
- Vous prétendez être réelle ! Sérieusement ?  Une hallucination collective, peut-être ?  
- Une apparition qui croit encore  au Prince charmant ! Trop drôle ! Après cinq divorces, j’appelle ça un mirage !
-Ecoutez, votre place n’est clairement pas ici. Que penserait-on de nous, qui œuvrons pour la libération des femmes ? 
-Nous perdrions tout crédit en un clin d’œil ! 
- Nous serions la risée générale ! La blague du siècle ! « Le comité et la princesse endormie ! » Non merci !
Elles s’accordèrent toutes pour éloigner  Aurore au plus vite.  
Elle sentit l’animosité croître autour d’elle. Dépitée, bien qu’elle comprît que ces femmes luttaient aussi à leur manière pour leur émancipation, son destin de personnage de conte de fée, avec sa beauté intemporelle, lui parut soudain plus enviable !

 

Le boulanger-pâtissier       Bernadette B.

Sur l’air de « Il changeait la vie » (J.J. Goldman)
C’était un boulanger et aussi pâtissier    
Dans un village déserté    
Qui faisait du bon pain et aussi des sablés    
Que tous aimaient à déguster
    
Il travaillait la nuit    
Pour que dès sept heures tous aient du bon pain    
Au boulot chaque jour, manœuvrant son pétrin    
Et grâce à lui enfin, le village mangeait sain    
C’était un type bien

C’était un bon boucher, habile charcutier    
Qui savait très bien découper les beaux quartiers
 Car tous les moins nantis, ayant peu à manger
Méritaient  aussi d’avoir de la qualité
    
C’était un gros bonhomme, un bien joufflu bonhomme    
Très habile et au grand cœur, une crème d’homme en somme    
Généreux par nature, pas comme bien d’autres hommes    
C’était un type bien    

C’était un musicien, un simple musicien    
Qui jouait dans la rue, accompagné d’son chien    
Les passants l’aimaient bien mais souvent n’donnaient rien    
L’écoutaient mais jamais ne lui tendaient la main
    
Les vacheries de la vie, les coups pourris aussi    
Sa femme partie depuis avec son seul ami    
Ses enfants éloignés, n’pouvant vivre avec lui    
Ses larmes qui coulaient en repensant à leurs cris    
C’était un type bien    


A partir du musée du jouet :    Denise D.

Hello ! je m’appelle Beerly, je suis un ours brun du Canada… en peluche. J’ai vécu dans une famille où une petite fille m’a adopté comme animal de compagnie. Aujourd’hui on dirait "un doudou". J’ai été choyé, bercé, bringuebalé, par monts et par vaux. Elle ne pouvait dormir sans ma compagnie, et si d’aventure elle m’oubliait quelque part, son papa était obligé de venir me rechercher tant elle pleurait. J’ai eu une belle vie même si j’y ai perdu un œil, un bras et si mes jambes sont disloquées. Puis un jour, j’ai atterri dans une malle en osier au grenier où j’ ai dormi très longtemps. Ici, au musée, on m’a  redonné un œil, un bras, réparé mes jambes et restauré ma dignité.